Dans la rubrique « Y a que les idiots qui ne changent pas d’avis », je vous présente aujourd’hui la Jan Ray signature Mateus Asato du constructeur japonais Vemuram.
Don’t believe the Hype… nor the Builder
Bien que curieux de tester la Jan Ray dès sa sortie, j’ai évité la marque pendant des années ; principalement pour des raisons de communication et marketing, de budget ensuite.
En effet, la justification du tarif demandé pour « les années de développement » nécessaire à la création de la pédale qui s’avère être une variation des premières Timmy de Paul Cochrane me semblait être de la fumisterie pure et simple.
Entendons-nous bien : je ne suis pas contre investir des sommes importantes dans du bon matériel de musique, mais il y a certaines limites psychologiques que je n’arrivais pas à dépasser. Et faudrait pas nous prendre pour des cons en sus !
Malgré son tarif prohibitif, la Jan Ray a rencontré son petit succès au-delà de la sphère des pedal-snobs et de plus en plus de guitaristes confirmés l’ont adopté. La marque a sorti entre temps d’autres modèles, toujours aussi couteux, qui ont également trouvé leur public. La tendance générale m’indiquait que ça devait quand même être un peu plus qu’un effet de mode ou de snobisme, et que malgré un manque d’honnêteté de la marque, la qualité devait être au rendez-vous.
« Finalement, on va peut-être lui donner une chance à cette Jan Ray ! » Et quitte à taper (trop) de blé dans une Vemuram, autant que ça soit pour la version limitée à 500 exemplaires de la signature Mateus Asato.
Après 3 ans de recherches (j’étais un brin résigné, avouons-le), j’ai fait des pieds et des mains pour l’acquérir à un vendeur récalcitrant aux USA et j’ai finalement pu l’ajouter à mes pedalboards.
Jan Ray
La Jan Ray est une pédale de gain faible à modéré qui simule l’overdrive des amplis Fender Blackface des années 60 poussé dans leur sweet spot : un son puissant et clair qui conserve les caractéristiques de la guitare et de l’ampli lorsqu’elle est réglée en boost ; et qui impose son onctuosité dans les réglages plus couillus.
Un réglage de gain, un autre de volume et un tandem Bass / Treble pour l’égalisation vous permettent de sculpter votre son d’une manière précise. Un trimpot (vis à tourner) vous permet d‘ajuster la plage de gain désirée (en apportant plus de compression avec un gain plus élevé).
Le boitier en laiton en impose : c’est du lourd – et ça pèse ! Les mauvaises langues diront que c’est pour justifier le tarif 😀 Dommage pour les typos du logo et du modèle qui ne sont vraiment pas à mon gout.
Mateus Asato Signature
La Jan Ray for MA est une déclinaison créée sous la supervision de Mateus Asato, un jeune prodige de la guitare originaire du Brésil qui propose une musique riche teintée de rock, country, Jazz, Blues, Gospel et Neo Soul.
Esthétiquement, le châssis se voit garni d’un logo discret à l’arrière représentant la silhouette capillaire de l’artiste tandis que le laiton est teinté légèrement de rose sur les bords. (La version normale (dans le paragraphe précédent) a un dégradé plutôt dans les jaune/or, la Mateus Asato rend un aspect plus rouge/rouille).
À l’intérieur, cette version for MA dispose de plus de gain et un brin de compression supplémentaire, tout en préservant le headroom et la transparence de la Jan Ray originale.
Comportement
Il suffit de quelques notes avec la pédale enclenchée pour comprendre l’engouement pour cette Jan Ray.
On est tout de suite séduit par le dynamisme de la pédale. Cette grande réactivité traduit vos nuances de jeu de manière subtile tandis que les ajustements au potentiomètre de volume déclinent 1001 variations de cette overdrive onctueuse.
Elle se comporte comme un bon ampli, c’est ultra-plaisant : on a direct la banane 😉
La pédale est très simple à régler : on arrive très vite au résultat désiré. Les réglages de Treble et Bass sont très réactifs et permettent de sculpter votre son en s’adaptant à vos guitares et à vos amplis.
En effet, la pédale est assez transparente et va laisser l’ampli et l’instrument s’exprimer, en ajoutant sa touche de manière plus ou moins prononcée, selon vos désirs de réglages. Elle sonne aussi bien avec des micros simples qu’avec des doubles bobinages, des P90 et autres FilterTron. Ça fait plaisir.
La belle est polyvalente : du treble ou dirt boost à l’overdrive hargneuse, impossible de ne pas trouver son bonheur !
Je n’ai pas été subjugué par les modifications apportées avec le Trimmer de gain. Lorsqu’on l’augmente, la compression devient plus importante et à tendance à ramener les basses plus en avant. Je règle le trimmer généralement au 1/3 de sa course.
La version Mateus Asato est plus généreuse dans le bas médium que la version standard ; ce n’est pas pour me déplaire avec en situation de groupe (à plusieurs instruments dans mon cas). Ça apporte une certaine chaleur au son, mais aussi une belle assise (surtout en notes seules) tout en perçant dans le mix.
Clone ou pas clone ?
Techniquement parlant, les schémas des 2 pédales sont quasi identiques à 2-3 éléments près. Vous pouvez les faire sonner l’une comme l’autre, sous réserve de les régler différemment.
La différence se situe dans la plage d’utilisation de chacune : comparez les réglages dans la vidéo ci-dessous, vous verrez que vous aurez plus ou moins de marge selon les réglages choisis. La Jan Ray a un peu plus de bas médium et va un peu plus loin dans les aigus et dans le gain (avec l’aide du trimmer). L’autre grosse différence, c’est le tarif de la Timmy que l’on trouve à 140$ et face au 385€ de la Jan Ray.
Je n’ai plus de Timmy sous la main pour faire un test A/B digne de ce nom, mais celle que j’ai eu en prêt prolongé il y a quelques années m’avait bien plus sans que je m’y arrête plus que ça. Étant assez content de mes différents pédales de boost/low gain overdrive, je ne m’y étais plus intéressé après l’avoir rendu à son propriétaire.
D’après mon souvenir, la Timmy est un peu moins plug-n-play que la Jan Ray, mais tout aussi délectable. Cette redécouverte du circuit par l’entremise du fruit de son inspiration m’a donné envie de racheter une Timmy, car oui : ce sont de très bonnes pédales toutes les deux ; on en veut vite plus – mais pas spécialement au tarif de la Japonaise 😀
Sur ce chapitre, je dirais : pas clone, mais la descendance est impossible à nier. Et pour une utilisation en boost/très low gain, autant prendre la Timmy ! (La Asato, c’est autre chose)
Conclusion
Ce qu’une bonne partie de la communauté reproche à Vemuram, c’est d’avoir nié l’inspiration évidente du travail de Paul Cochrane, en goopant le circuit afin de le cacher et, surtout, en affichant le produit 200 euros plus chers que la Timmy sous prétexte des années de développement nécessaire à l’élaboration de la pédale.
C’est sacrément pas cool de copier une entreprise qui est toujours en activité ; un petit fabricant réputé de surcroit, en lui piquant la vedette avec des artifices visuels (le boitier de la pédale par ex.) et marketing (cf argumentaire). Surtout pour braquer le client derrière !!
Ceci dit, on n’en fait pas tout un fromage quand il s’agit de proposer une énième variation de Tubescreamer (comme si c’était « moins grave » parce que Maxon et Ibanez sont de grosses boites – un autre débat 😉 ).
Dans le monde de la musique, on n’est « plus à ça prêt » depuis des lustres : rares sont ceux qui n’ont pas pompé un jour ou l’autre sur le concurrent en changeant l’un ou l’autre composant. Cela arrive même au sein d’une même marque : 1 ou 2 valeurs de composants changés justifiaient la création d’un nouveau modèle (ex. Marshall Super Lead et le Super Lead Bass).
C’était possible au début et c’était relativement toléré, car nous n’étions pas dans une abondance de matériel et d’échanges de connaissances comme de nos jours. Avec Internet et les communautés de passionnés et techniciens qui s’y sont formés, ce n’est plus possible d’enfumer les foules et de voler le travail d’un autre. Le débat aurait été moindre s’ils avaient simplement annoncé « leur vision de la Timmy » ou « inspirée d’une célèbre overdrive transparente » à un tarif plus décent.
Malgré les apparentes mimiques possibles entre la Timmy et la Jan Ray, mises en avant dans la vidéo ci-dessus, elles sont quand même différentes en terme de sonorités ; particulièrement cette version Mateus Asato plus généreuse en bas médium.
Le débat éthique mis à part, le tarif de la Jan Ray est malgré tout exagéré. Lorsqu’elle s’affiche à un tarif d’occasion, cette pédale est par contre une belle opportunité d’ajouter un boost qui saura se faire une place sur votre Pedalboard. Sinon, trouvez-vous une Timmy, ça fera très bien le job aussi 😉
Ca reste une super pédale, probablement une des meilleures que je possède, mais comme toute bonne pédale d’overdrive : 200-250 euros reste un maximum à ne pas dépasser sauf transistors NOS ésotériques et autres séries limitées. Limite, c’est la Timmy qui n’est pas assez chère (même si on ne se plaindra pas d’avoir une super pédale à bas prix) !
Bref, la Jan Ray est trop chère, mais néanmoins superbe !
Si vous trouvez une Mateus Asato : sautez dessus ! Sinon, regardez peut-être du côté des Timmy ou les Jan Ray d’occasion 😉