J’ai le plaisir de vous présenter la magnifique Moon Canyon, une triple pédale du déjanté fabricant néerlandais Dr.No. Un véritable travail d’orfèvre qui vient sublimer esthétiquement un concept simple et efficace : un assemblage de 3 effets réputés dans un seul boitier, avec quelques twists.
Cette pédale est une série limitée à 350 pièces, dont le Docteur ne met en vente que 50 exemplaires à chaque pleine lune ! La Blood Moon Edition ici présentée est en quelque sorte une édition limitée de l’édition limitée, puisque les 50 exemplaires de la pleine lune du 21 mars 2019 intègrent des leds bleus et surtout une lune rouge n lieu et place de la « jaune » habituelle au centre de la pédale. Je n’en demandais pas tant 😀
Un concept
Pour cette Moon Canyon, Dr.No s’est inspiré de Sarah Lipstate, la guitariste du groupe Noveller, pour créer une pédale signature comme on en rencontre peu dans le monde des effets boutique.
Outre l’aspect limité de la série et sa distribution parcimonieuse toute les lunes, Dr.No a pris le temps de pousser le concept dans ces retranchements avec une mise en boite, mise en beauté et mise en scène d’une justesse simplement parfaite.
Dans le joli boitier décoré à la main, on retrouve (dans l’ordre) : une overdrive à 2 voicing, une loop pour insérer d’autres effets, ainsi qu’une reverb placée avant un delay digital voicé analog. Le tout, avec 2 sorties (non stéréo) qui permettent d’attaquer 2 amplis ou chainage différents derrière.
Pour présenter sa créature, le Doc n’a pas hésité à mettre le petit plat dans les grands :
Dans le genre, ce n’est pas la vidéo la plus explicite sur les possibilités d’une pédale que l’on ait pu voir – je vous l’accorde 😀
Une oeuvre d’Art
Je m’arrête rarement autant sur look des pédales (même si certaines sont vraiment moches), mais ici, il faut bien avouer que la Moon Canyon est un magnifique objet.
De la pédale à la boite, en passant par les goodies : tout est superbement fini et choisi avec gout. Les mini potentiomètres « Chickenhead », les leds astucieusement positionnés sous les footswitchs, la sphère centrale qui s’illumine au fur et à mesure qu’on enclenche les effets : c’est splendide !
Admirez plutôt :
Overdrive JRC4558D
Premier dans la chaine d’effets interne à la pédale, l’overdrive est basé sur la puce bien connue JRC4558D qui a fait le succès (notamment) des Tubescreamer TS808. On retrouve un trio Volume / Tone / Drive pour contrôler l’effet, ainsi qu’un switch latéral qui donne le choix entre 2 voicing différents.
Le mode normal est probablement le plus polyvalent, et permet de se placer dans le mix assez facilement avec la petite bosse traditionnelle des pédales basées sur cette puce. Je l’utilise comme ma fidèle OD808, principalement en boost, pour amener mes saturations principales un étage au-dessus ou pour pousser l’ampli.
Le mode « full range » vient égaliser un peu tout ça, en apportant plus de basses et de corps, mais en lissant un peu le mid hump caractéristique. C’est sympa quand on joue tout seul, mais en situation de groupe, c’est un peu moins pratique. Je préfère le mode normal.
Loop
On a tous notre/nos pédales de saturation préférée(s) et Dr.No s’en est souvenu lorsqu’il a conçu cette plateforme qu’est la Moon Canyon.
Dans cette loop, vous pouvez donc connecter une ou plusieurs pédales de votre choix et activer ces effets d’une pression sur la pédale. Dans mon cas, ce sont plutôt des pédales de saturation qui s’y trouvent, mais vos effets de modulations iront idéalement à cet endroit, avant la reverb et le delay.
Lorsque rien n’est branché dans les sortie/entrée du loop, activer la foot switch a pour effet de muter le son. Pour éviter les mauvaises blagues, vous pouvez mettre un câble du loop OUT vers le loop IN. On fera donc bien attention de ne pas l’activer par mégarde 😉
Une autre option est d’utiliser l’une des 2 sorties pour changer l’ordre des effets et venir mettre la reverb et le Delay avant la section Drive (on se connecte à la pédale via le Loop IN, on connecte la sortie OUT 1 à l’INPUT principal, et on sort de la pédale avec le Loop OUT). Les shoegazers devraient apprécier 😛
Avec la même logique, vous pouvez connecter le Drive et le couple Reverb/Delay séparément à un switcher de pédales pour les intégrer à votre setup habituel (Drive : Input=entrée + Loop Out=sortie / Reverb/Delay : Loop In=entrée + Out 1=sortie).
Reverb Belton
Dr.No a sculpté sa reverb autour de la version longue de la Belton Reverb brick (BTDR-2H) d’Accutronics, une puce qui sert de base à une série de reverb de haut vol dont la Neunaber Wet Reverb qui m’accompagne avec bonheur depuis des lustres.
Un seul potentiomètre vous permet d’ajuster le taux de reverb désiré. Le circuit calibré par Dr.No fait super bien le boulot en l’état, mais j’aurais quand même aimé aller un peu plus loin dans l’intensité de la reverb. A contrario, des réglages trop extrêmes n’auraient probablement pas bien donné avec le delay derrière… Choisir, c’est renoncer – je suppose, dans ce cas-ci.
On se retrouve face à un reverb un peu hybride avec une belle profondeur et de subtiles modulations. Elle a un côté un peu claquant, un peu façon spring reverb (sans y toucher), mais ce n’est pas le « boing » typique pour autant. D’un autre côté, c’est plus aéré qu’une room et moins cathédrale (et plus bright) qu’une hall. C’est très musical dans l’ensemble !
Je la trouve un peu discrète lorsqu’elle est réglée avant 11h, mais elle apporte une petite brillance intéressante. Clairement, c’est entre 15h et 17h que je la préfère et l’utilise le plus (presque à fond la majorité du temps).
Delay PT2399
Après la JRC et la Belton, une troisième puce bien connue, la PT2399 prend place dans la Moon Canyon pour propulser la section Delay. Le circuit est contrôlé par un trio Mix (dosage du volume des répétitions dans le mix), Time (décalage de 0 à +/- 500 millisecondes par rapport à la source) et Repeats (pour gérer le nombre de répétitions). Classic shit.
Ce Delay voicé vintage permet des applications classiques type slapback etc sur le 1er tier de la course du contrôle temporel ainsi que des délais plus long (entre 11h et 13h). Vous pouvez donner un aspect rythmique à votre reverb (placée avant, pour rappel) de manière très musicale et inspirante.
Les nappes auto-oscillantes commencent avec le Repeats à environ 2h. En poussant le potard à fond, on arrive à des folies lo-fi ou c’est la pédale qui prend les commandes. L’idée est de jouer également avec les potards Time & Mix pour trouver la bonne balance entre les nappes oscillantes et signal dry.
S’il n’a rien de révolutionnaire, ce énième delay décliné autour de la PT2399 est particulièrement bien foutu. Les oscillations sont vraiment convaincantes et sa combinaison avec la reverb en amont fonctionne bien.
En action
Série de 3 vidéos :
Et la vidéo de JustNick (ndlr : je n’adore pas ses démos…) :
Conclusion
Malgré le peu démo disponible, je peux dire que c’est vraiment conforme à ce à quoi je m’attentais en prenant possession de ce condensé de classiques revisités.
C’est bien pensé et magnifiquement conçu ! Le choix de l’OD808 qui pousse super bien les pédales, l’insertion du loop simple et efficace, la reverb pas trop extrême, le delay qui va bien, …
Je ne découvrais pas l’option de la reverb avant le delay, car je pratique de la sorte depuis des années sur le FATBoard (notamment), mais c’est original et ca permet de sortir des sentiers battus !
Dans la pratique, la Moon Canyon constitue la pierre angulaire de l’EXTRABoard. Elle est entourée d’un clean boost en amont et de 2 delay/reverb en aval pour augmenter la polyvalence. J’insère mes saturations dans la boucle et je peux les booster avec la section Drive du canyon lunaire. Niveau ergonomie, je n’ai qu’un reproche : la sphère est un peu trop près des footswitches : il faut s’habituer à placer son pied pour ne pas défoncer l’oeuvre du Docteur 😉
Finalement, 439€ pour 3 effets (sans compter la loop), ca fait moins de 150€ par effet (110 si on compte la loop) : c’est tout à fait raisonnable pour du matériel fait à la main avec ce niveau de finition.
J’en suis vraiment très content !