Dirty Molly version 2020, c’est avant tout l’histoire d’un projet d’upgrade qui dérape.
Genèse du projet
Fin de l’année dernière, ma vaillante Jazzmaster Blacktop abondamment modifiée part chez Denzo Custom initialement pour faire une petite peinture et remplacer un micro.
Conquis par le feeling manche de la Denzo Countervail réceptionnée entre-temps, je lui passe également commande d’un nouveau manche pour la Fender ; qui sera désormais estampillée Denzo.
Les discussions autour du projet avancent et je ne sais plus trop comment, on en arrive à la conclusion qu’on testerait bien un corps « chambré » de chez Warmoth. Ces corps creusés de diverses cavités permettent en effet d’alléger la guitare sans trop retirer des qualités vibratoires. Étant toujours en délicatesse avec mon dos, l’option me paraissait intéressante (même si je n’arriverai pas au poids plume de la Countervail).
De fils en aiguilles, cette upgrade ressemble à s’y méprendre à une nouvelle guitare 😀
Relookage Sonic Blue
Pour habiller cette nouvelle base corps/manche, j’ai opté pour une peinture Sonic Blue faded, légèrement reliquée, en combinaison avec un pickguard métallique doré dit gold anodized.
Un combo tape à l’oeil qui m’obsède depuis des années. Le moins que l’on puisse dire, c’est que cela change radicalement du sunburst 😉
Le résultat est à la hauteur de mes espérances. Des craquelures discrètes de la peinture à la couleur dorée usée du pickguard, en passant par la teinte du manche matchant magnifiquement l’ensemble, je ne trouve rien à redire ! Elle est sublime. Parfaitement à mon goût.
Rescapés
Le vibrato Bigsby B5 était l’une des upgrades les plus caractéristiques de la version précédente : il a bien sûr été conservé. On y a ajouté un String Spoiler, comme sur la TeleStrat, pour plus de facilité lors des changements de cordes.
Le feeling est assez différent du Mastery qui équipe la Countervail, mais il fonctionne très bien et surtout, j’y suis bien habitué ! Esthétiquement, cela différencie Dirty Molly des modèles standards.
J’ai conservé le chevalet Tune-o-Matic ajouté il y a des années. C’est vraiment un des bridges sur lequel je suis le plus à l’aise pour faire tout ce qui est palm-mute. Rien à faire, j’y reviens souvent pour ne pas dire toujours.
Côté rescapés, j’ai également gardé le micro Lollar Jazzmaster neck. « Forcément » ai-je envie de dire, car il s’agit d’un de mes micros préférés tous styles confondus. Pour l’accompagner, j’ai remplacé le Wide Range Curtis Novak par un P90 Heartbreaker Roxi Deville en position chevalet.
Électronique remaniée
Pour rappel, une erreur de commande chez Novak m’a fait recevoir des micros en spécifications strictement originales, c’est à dire des Wide Range aux plots non-waxés – avec pour conséquences de gros larsens. J’ai essayé de m’y faire pendant quelques mois, mais ca me gonflait vraiment trop. J’ai fait sauter le Wide Range au neck de la Chapman pour les mêmes raisons.
Le P90 Roxi Deville répond bien plus à mes attentes et est plus en accord avec mes goûts. On ne va pas comparer des pommes et des poires, mais la combinaison du P90 avec le Lollar au neck est nettement plus intéressante qu’avec le WR.
Cette config micro P90/JM est dans la lignée de la P180/JM de la Countervail, mais si l’esprit est le même, les rendus sont assez différents malgré tout. Dirty Molly n’est certainement pas un doublon !
Le nouveau pickguard Gold arrivait déjà prétroué pour une configuration Jazzmaster classique.
Pour occuper les trois cavités supérieures, nous avons opté pour une inversion de phase entre les micros, un treble bleed pour conserver les aigus quand le volume est baissé et un killswitch sous forme de mini-toggle switch.
Le tout est piloté par un volume et une tonalité générale, avec un push-pull sur la tonalité qui permet d’activer un direct-out. Ce système permet de court-circuiter le câblage interne pour envoyer les micros directement à la sortie de la guitare. Bref, tout à fond.
Nouveau feeling
Sur suggestion du Chef, le manche est équipé des frettes Jescar Medium Jumbo de 2,5 mm.
Aimant bien varier les plaisirs en matière de guitare et m’adapter aux caractères de celles-ci, je ne m’étais jamais intéressé plus que ça aux frettes en particulier. La comparaison ici faite sur 2 manches du même concepteur au radius et essences identiques est sans appel : j’ai désormais des préférences en la matière 😀
Elles me procurent d’excellentes sensations : mon jeu est plus propre (ce qui n’est pas du luxe) et est plus expressif. C’était encore une fois un excellent conseil de David ; une belle découverte.
Comme à son habitude, Denzo a soigné les détails. Le travail est minutieux et le confort au rendez-vous : la touche en Indian rosewood est super agréable, l’érable du manche tient parfaitement en main et autorise des déplacements rapides grâce à une bonne glisse.
La tête est équipée de mécaniques étagées qui aident également à la très bonne tenue de la guitare.
Denzo contre Denzo
Après l’avoir mentionnée tout au long de l’article, je ne pouvais passer à côté d’un inévitable comparatif avec la Countervail, la vision de Denzo sur les guitares offset inspirées de la Jazzmaster.
Bien qu’elles se partagent une forme et une configuration de micros plus ou moins identiques, leurs spécifications respectives en font deux guitares bien distinctes. On est bien sûr dans le même registre sonore, mais avec des feelings de jeu tellement différents qu’on ne peut les confondre quand on les joue.
Malgré le côté chambré du corps Warmoth, la différence de masse est toujours là. Le poids plume de la Countervail lui confère une sensation bien à elle, tandis que les micros réagissent différemment dans le Mystic Wood ultra léger que dans l’aulne de chez Warmoth.
Autant je ne décollais pas de la Countervail depuis sa réception, autant j’alterne entre les 2 désormais. Elles ont toutes les 2 leurs qualités, avec le poids d’un côté et la grande polyvalence de l’autre – comme 2 soeurs au caractère différent !
Parce qu’elle est accrochée dans le salon et donc plus accessible, je mets encore la Countervail devant en terme de temps de jeu (disons 55-45%).
Plus sérieusement, c’est impossible de les départager. Vraiment.
Conclusion
Vous l’aurez compris, on peut difficilement parler d’une upgrade dans ce cas-ci.
C’est une nouvelle guitare avec quelques pièces anciennes. Mais pas n’importe quelle guitare !
Esthétiquement, je suis comblé : c’est exactement ce que je voulais et la réalisation est impeccable.
Elle sonne très bien à vide et ne désaccorde pas beaucoup malgré le B5. Je mettais l’excellente tenue d’accord de la Countervail sur le compte du Mastery, mais j’ai bien envie de croire que c’est surtout l’excellent travail de création, d’assemblage et de mise au point de l’instrument qui en fait un outil aussi fiable. Elle est bien née – bien assemblée. Ça se sent.
Tandis que sa forme de Jazzmaster est probablement ma préférée, le Bigsby et le Tune-o-Matic me font sentir à la maison. La guitare est ultra confortable et le manche y est pour beaucoup. Tous les ingrédients sont réunis pour s’adapter à mon jeu. Je suis ergonomiquement servi ! Difficile de faire mieux.
Le Lollar continue de m’enchanter, tandis qu’Heartbreaker signe encore un micro dantesque que je continue d’apprivoiser de jour en jour avec toujours plus de plaisir. Très dynamique, juste ce qu’il faut de gain (pas trop) avec des aptitudes modernes et une grande polyvalence. L’ADN est bluesy, mais on peut faire beaucoup de chose avec ce micro !
Les différentes options offrent de vraies possibilités à la guitare ; pas juste des gadgets à l’impact minime comme j’ai pu avoir par le passé. Mention spéciale au killswitch particulièrement bien réalisé. Il n’y a quasi pas de bruit (« ploc »), ce qui, vu le bordel que cela a pu être sur d’autres précédents projets (chez plusieurs autres luthiers), n’est visiblement pas si facile que ça à faire (un relativement silencieux en tout cas 😀 ).
L’association du direct-out et du treble bleed est particulièrement intéressante. Elle permet de trouver un son tamisé avec de bons aigus en baissant le volume et de pouvoir envoyer la sauce lorsque nécessaire. On retombe facilement sur son réglage calme en désactivant le direct-out. C’est vraiment très pratique !
Je suis à nouveau très impressionné par le travail de Denzo.
Il s’agit là d’une de mes meilleures guitares à tout point de vue.
Spécifications
• Corps en Aulne chambrée
• Finition Faded Sonic Blue Relic
• Manche Maple + touche Indian rosewood
• Sillet os
• Frettes Jescar Medium Jumbo 2.5mm
• Mécaniques étagées
• Pickguard aluminium anodisé
• Bridge TOM
• Bigsby B5
• Micros P90 bridge Heartbreaker Pickups + Lollar Jazzmaster neck
• Kill switch + phase switch + treble bleed switch + direct out via Push-Push sur le Tone en bas