Une fois n’est pas coutume, n’ayant pas trouvé de système conforme à mes désirs en scrappant les Internets, je me suis lancé dans un nouveau projet custom. C’est à l’univers parfois sous-estimé des enceintes et baffles que je m’intéresse cette fois-ci.
L’importance du tandem ampli/speaker
Ma première prise de conscience s’est passée lors d’une séance de test de speakers avec le collectif Hard Stuff Box pour le développement de l’ampli « Le Brame » il y a quelques années.
Les rendus étaient très différents et cela m’avait vraiment bluffé de voir un même circuit ainsi transformé. Nous avions opté pour le ACE 50, un 12 pouces AlNiCo de chez Tayden pour notre bébé ; une gamelle qui s’avère être vraiment sympa sur tous mes amplis au final.
Limité à l’époque par le respect de mon voisinage en appartement, je ne jouais que très peu avec un baffle ; exploitant mes amplis au casque via les loadbox/simulateurs d’enceintes Sequis (pas trop de réglages) et Torpedo Live (trop de réglages, donc souvent les 2 même presets V30 – AlNiCo Blue et puis basta).
Depuis mon déménagement, j’ai rapatrié mon cab Mesa Black Shadow, mon Tayden et mon vieux 4×12 Ampeg dans le Music Lab, ma pièce à musique. Je profite à nouveau des joies des oreilles qui saignent et des intestins qui vibrent en lâchant les watts.
Grâce à la qualité de ses émulations et à sa facilité de switcher entre des presets « vite fait, bien faits », l’OX Top Box m’a permis de souligner à nouveau à quel point le choix du speaker était important pour faire chanter un ampli au mieux.
Si vous avez l’OX ou un système équivalent, faites le test : sélectionnez la sortie raw/directe et jouez sans simulation de speaker (chose impossible sans loadbox, on est d’accord, on n’est « jamais » supposé entendre ça). Vous constaterez que votre ampli sonne très moyennement de base. C’est son interaction avec l’enceinte (et le box dans lequel celle-ci est installée) qui fait le son électrique qui nous plait tant.
Alors, c’est clair : acheter des baffles, ce n’est pas comme acheter une pédale ou une guitare. C’est pas très sexy, on n’est pas toujours sûr que ça fonctionnera bien avec son ampli, cela nécessite un peu de matériel de soudure et d’expérience pour l’installation et cela occupe vite beaucoup d’espace si on commence à les multiplier !
Mais avouez que c’est quand même un comble de délaisser un élément qui constitue un changement aussi drastique de votre son !
J’en suis arrivé à la conclusion que ce serait plutôt intéressant d’avoir différents haut-parleurs dans un même cab pour avoir plusieurs couleurs, textures et feeling sous la main dans un espace relativement réduit. Un genre de « Recording Cab » destiné à la salle de répète et aux enregistrements.
Vieux cocktails à risques
Intégrer des speakers différents dans un même cab, ca n’a rien de nouveau : les forums regorgent d’exemples aux succès divers. En effet, plusieurs facteurs jouent contre ces métissages et mettent même les configurations les plus excitantes sur papier à l’épreuve des tests en conditions réelles.
Il y a le risque d’annulation de phase entre différents speakers, le fait que certaines combinaisons de baffles trop similaires risquent d’accentuer trop une ou plusieurs plages de fréquences, ou encore des problèmes de repisse entre les speakers qui se fait entendre à l’enregistrement. Il faut également faire attention au rendement de chaque HP pour garantir un équilibre, même approximatif, en terme de décibels (on essaye de ne pas dépasser 3dB d’écart). Et évidemment, il faut matcher les impédances.
De ce que j’ai pu lire, j’ai retenu que beaucoup de celles et ceux qui avaient testé 4 hp différents en revenaient et préféraient au max 2 speakers différents. Me voilà prévenu.
Mixed Cab Concept
Le but du Mixed Cab n’est pas d’être utilisé comme un cab 4×12 traditionnel, mais plutôt comme une combinaison de 4 enceintes que l’on peut accoupler de manière créative selon les situations.
UNE ENTRÉE PAR SPEAKER
Chaque enceinte est munie de son entrée 8 ohms et peut être connectée à un ampli, comme un 1×12″ standard.
On pourrait y brancher jusqu’à 4 amplis différents, chose qui peut s’avérer être utile pour jammer dans un espace réduit – même si je ne m’attends pas spécialement à des résultats équivalents à 4 baffles séparés.
UN LINK PAR SPEAKER
Les haut-parleurs peuvent s’utiliser en couple via un link à l’arrière pour les combiner par paire (au maximum, pour des raisons d’impédance) à l’instar de ce qui a été fait dans le cab Mesa Boogie avec une sortie parallèle pour brancher un 2ème cab.
Chaque enceinte possède sa sortie Link, de manière à proposer toutes les combinaisons possibles.
Pour les relier, un simple câble patch (speaker) à l’arrière pour connecter 2 enceintes au choix, à la façon des opérateurs radios du siècle dernier. J’ai pensé au switch rotatif, mais cela devenait vite compliqué.
L’idée est de pouvoir faire des mix entre 2 enceintes, ou de les combiner pour exploiter un ampli stéréo ou dual outputs.
UN CAB MERGER-LIKE POUR LA TOTALE
J’aurais pu m’arrêter là… mais cela aurait été dommage de se priver de jouer avec les 4 baffles en même-temps ; même si ce n’est pas l’objectif initial du projet 😉
Le système Mixed Cab incorporera donc en sus, sur papier à ce stade, un système équivalent au Cab Merger de Palmer pour combiner les duos de HP en mode 2x(2×12).
Le résultat dépendra forcément de la sélection des speakers à l’intérieur. Se marieront-ils tous ensemble ? Rien n’est moins sur ! Mais si l’envie vient de modifier la configuration de haut-parleurs par la suite, le système est prêt pour repasser en mode 4×12 traditionnel.
Développement avec Rutherberg
Avant de me lancer éventuellement dans un beau cab tout bien fait, je compte modifier mon vieux 4×12 Ampeg guitare du début 90 pour tester le concept. J’envisagerai un travail plus soigné si les premiers tests s’avèrent concluant.
J’ai confié la tâche à Geoffray de Rutherberg Amplification, basé à Saint Vith.
C’est un jeune technicien et fabricant d’amplis belge qui a su me charmer par son écoute attentive, ses judicieuses observations et la qualité de ses réalisations. Le feeling est passé d’emblée.
En plus d’être relax, humble et sérieux comme on peut l’être dans les cantons de l’Est, Geoffray est particulièrement bien équipé et ses créations à disposition dans l’atelier mettent l’eau à la bouche. Je vous en reparlerai bientôt dans un article dédié 😉
Il a donc accepté de me suivre dans mes délires et s’est mis au travail ! Je lui ai confié 2-3 autres bricoles à faire par la même occasion, car je n’avais plus d’amp-tech attitré à ce jour.
Choisir, c’est renoncer
La sélection ne s’est pas faite sans mal tant l’offre est pléthorique et les estampillés classiques nombreux.
J’ai d’abord envisagé de mixer des enceintes voicées à la fois British et American pour coller aux différents styles de mes amplis, mais c’était vraiment impossible de me restreindre à 4 haut-parleurs.
J’ai finalement décidé de consacrer la première mouture du projet Mixed Cab à Celestion, la marque qui représente quasiment à elle seule le son British dans ses variations les plus classiques.
Cela n’a pas été un choix facile non plus au sein de la marque, car j’avais une petite dizaine de références dans ma short-list. Et je ne parle même pas des versions « boutique » et reproductions des modèles vintage, notamment par Scumback.
Pour ce premier jet, j’ai sélectionné :
• VINTAGE 30 : Classique parmi les classiques chez Celestion, le V30 est plébiscité pour avoir un son pêchu et un placement facile dans le mix en groupe. Il n’a de vintage que le nom, car il est plutôt destiné aux sonorités rock et métal.
Après avoir fait mes classes sur ce speaker, je l’ai snobé pendant tout un temps, car un peu raide et agressif dans le haut médium et les aigus à mon gout lorsqu’il est joué seul. Je me suis récemment réconcilié avec grâce à l’OX Top Box (comme quoi, ça va dans les 2 sens). La simu de V30 4×12 sortait simplement mieux de mix !
Le Vintage 30 reste une référence qu’il est bon d’avoir dans son arsenal, surtout quand on veut envoyer un peu du lourd 😉 Il est également souvent mixé avec bonheur à d’autres références, vraiment vintage, que j’ai sélectionné.
• AlNiCo GOLD : C’était notre deuxième choix lors du précédent test de speakers évoqué en introduction et cela s’était joué d’un cheveu avec le Tayden ! Je pense qu’à l’époque, nous avions privilégié Tayden pour l’aspect petite entreprise, dans l’optique leur faire un peu de pub à leurs excellents produits
Depuis ce test, l’AlNiCo se décline dans une prometteuse (sur samples 😉 ) version Creamback. Je me suis limité à ce que je connaissais pour commencer !
L’AlNico Gold est donc le grand frère du Blue, qui peut encaisser jusqu’à 50 watts (contrairement au 20 watts du Blue) avec des aigus un peu plus doux et des basses bien rondes. Il sature logiquement moins vite que le Blue. Le grain vintage de l’alliage d’aluminium nickel et cobalt viendra compléter la palette de sonore pour des crunchs à l’ancienne.
Par ailleurs, je sais que le Gold et le V30 se marient bien ensemble (testé avec succès dans 2 cab séparés, cela devrait fonctionner dans le même cab 😉 ).
• G12M-25 GREENBACK : Dans les multiples déclinaisons du G12M, je demande la version de base made in China. Une fois n’est pas coutume, c’est le moins cher de la bande qui gagne ma préférence au feeling et à l’oreille. Outre les samples, c’est encore une fois l’OX Top Box qui m’a convaincu d’opter pour le Greenback.
Le G12M offre des sonorités hard, classic et blues rock avec des crunchs bien old-school. Des bas-médium très musicaux qui passent d’enfer en palm-mute, une saturation très caractéristique des aigus un peu en retrait et entre les deux, une plage de médium qui-va-bien comme il faut pour faire chanter l’ampli. Délicieusement sale.
De manière générale, je préfère le Greenback à la version Heritage made in England même si cette dernière n’est pas dénuée d’intérêt ! (plus propre, j’ai tendance préférer l’Héritage sur les amplis de type Deluxe et Twin – mais j’envisage désormais un box dédié à ce type de son 😀 )
Notez que le couple Greenback/V30 fait partie des recommandations mentionnées par Celestion sur leur site. Je me réjouis de tester ça, même si j’ai un peu peur que les rendements différents ne déséquilibrent le tandem (Le Greenback sera en haut et le V30 en bas pour -tenter de- compenser la différence de décibels). Sans compter que je devrais faire attention avec mes amplis dépassant 25 watts 😉
• G12M-65 CREAMBACK : Dans la famille G12M, je demande cette fois le cousin bodybuildé Creamback. Ce dernier peut encaisser 65 watts et, même s’il est supposé imiter le Greenback, on retrouve des différences dans le comportement mais aussi dans le rendu. Le grain est un peu moins aéré/vintage que le Greenback, et en ce sens, il est peut-être plus polyvalent ; passe-partout. Moins typé, mais plus défini / clair.
Il s’agit de l’enceinte de prédilection de François de FX amps, sur laquelle il développe ses amplis pour un rendu qu’il considère comme optimal/à son gout. Possédant 3 amplis de sa main, je me devais d’essayer la combinaison supposée idéale 😉
• G12H-75 CREAMBACK : Ici, nous sommes dans le domaine de l’expérimentation pure ! Je n’ai à priori pas spécialement d’affinités avec la série G12H. Le H pour Heavy Magnet a pour conséquence non seulement plus de puissance, mais une tonalité radicalement différente : des basses plus tendues, un aigu perçant (limite criard) et un médium plutôt flatté sur le haut, façon V30. Cette version Creamback encaisse jusqu’à 75 watts et s’inscrit dans la lignée plus incisive G12H.
Je me suis laissé tenté à cause de cette vidéo présentant les Creamback 75 et Greenback côte à côte et ensemble. Je trouvais la combinaison intéressante, surtout lorsque les enceintes sont pannées à gauche et à droite.
Cette deuxième vidéo m’a aussi aidé à me « décider », particulièrement sur la deuxième moitié dédiée aux crunchs. Cela m’a confirmé que je ne suis pas un grand fan du V30 seul pour ce type de crunch, et pas spécialement dingue du G12H non plus d’ailleurs, mais les combinaisons devraient être intéressantes.
J’ai évidemment regardé beaucoup d’autres vidéos comparatives, écouté des dizaines de samples et testé toutes les enceintes possible sur mon fidèle OX 😉
Alors oui, vous avez bien compté : 5 speakers, ça en fait un de trop.
Le box et les speakers seront équipés de connecteurs afin de switcher facilement de HP sans devoir sortir le fer à souder.
A ce stade, je ne peux pas vous dire qui sera le maillon faible. Cela se jouera probablement entre le V30 et les 2 Creamback, en fonction de leurs affinités et combinaisons possibles. Le Gold et le Greenback sont à priori titulaires !
La suite ?! Prochainement… mais pas dans l’immédiat, au vu de la tournure du confinement !
Stay tuned 😉